MADÈRE ET SES CURIOSITÉS

Si l’île portugaise outremer est bien connue de tous, certains faits plus ou moins curieux méritent d’être révélés et devraient susciter des envies d’escapade.

L’Histoire de l’archipel commence en 1418, avec la première découverte de l’île déserte de Porto Santo par João
Gonçalves Zarco et Tristão Vaz Teixeira. L’année suivante, ces navigateurs accompagnés de Bartolomeu Perestrelo, sont arrivés à Madère dans la nuit du 1er juillet 1419. Il s’agissait alors d’un archipel inhabité, qui en raison de son emplacement, à proximité de la côte africaine, s’est avéré d’une grande importance stratégique pour faire escale entre le vieux et le nouveau continent. Par ailleurs, en raison de son climat, l’île offrait un fort potentiel économique en particulier en ce qui concerne l’exploitation agricole. Madère compte aujourd’hui environ 250 000 habitants, et sa capitale Funchal qui tire son nom de « funcho » (le fenouil), 100 000 résidents.

S’il s’agit d’une région portugaise gérée de façon administrative comme ses semblables dites continentales, l’archipel se trouve au sud-ouest du pays, au beau milieu de l’océan Atlantique. En observant une carte, force est de constater qu’il est plus proche de l’Afrique que de l’Europe : à environ 725 kilomètres de la côte marocaine et un peu plus de 850 kilomètres de l’Algarve. Depuis Lisbonne, il faut compter 1h25 de vol pour atteindre Funchal et son célèbre aéroport.

Justement, l’aéroport de Funchal a longtemps été considéré comme l’un des plus dangereux au monde, à cause de la topographie de l’île, où il est impossible de trouver une plaine assez longue pour construire une piste d’atterrissage aux normes. Cette dernière est un chef d’œuvre de l’ingénierie. Après le fatal accident de 1977 où une centaine de personne ont perdu la vie, la structure a été prolongée et solidifiée pour ne plus être aujourd’hui considérée à risque. Toutefois, sa position géographique en bordure d’océan et les vents madériens font des décollages et des atterrissages une véritable attraction à sensation ! Par ailleurs, l’aéroport de Santa Catarina a été rebaptisé en 2017 Cristiano Ronaldo, en hommage au footballeur star natif de l’archipel.

En effet, Cristiano Ronaldo, le plus célèbre des joueurs de football portugais de tous les temps, est originaire de la ville de Funchal. Il a certes quitté son île natale depuis des décennies pour s’installer à Lisbonne, Manchester, Madrid, Turin et en Arabie Saoudite mais il a toujours conservé une relation étroite avec les insulaires. Plusieurs hommages lui sont rendus notamment à l’aéroport qui porte son nom, à l’Hôtel Pestana homonyme mais pas seulement. Le musée CR7, dans le centre de la capitale régionale, rassemble toutes les récompenses gagnées par le champion, dont ses 5 Ballons d’Or originaux ainsi que des copies des trophées obtenus avec ses équipes et la sélection nationale, ses maillots ou encore ses légendaires crampons.

Saviez-vous que Madère abritait la plus petite nation du monde ? En effet la Principauté de Pontinha, également connue sous le nom de Principauté de l’Ilhéu Da Pontinha, est une micro-nation autoproclamée, située sur un rocher de 178 mètres carrés, à 70 mètres au large de la ville de Funchal. La Principauté autoproclamée est une création du propriétaire de l’îlot, le soi-disant Prince D. Renato Barros II, Prince de l’Ilhéu Da Pontinha, un citoyen portugais et le seul de sa principauté jusqu’en 2014, date à laquelle elle s’est agrandie pour compter 3 habitants supplémentaires : sa femme et ses deux fils. Bien qu’il n’y ait jamais vécu, il a été contraint de vendre son minuscule territoire en 2017, dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité.

La colonisation de l’archipel portugais a commencé après sa découverte, et finalement, quelques décennies plus tard c’est celle du Brésil qui prendra forme. Point d’escale essentiel au voyage vers l’Amérique du Sud, les colons en plus de planter des vignes se sont lancés dans la culture de la canne à sucre, alors exclusivement brésilienne. Les plantations et par conséquent la production de « aguardente de cana » (eau de vie de canne autrement dit, le rhum) et de vin ont rapidement dominé l’économie de l’île. Toutefois, le commerce du rhum s’est rapidement concentré au Brésil et le négoce du vin a continué à prospérer, notamment au XVIIIe siècle, époque durant laquelle la présence des Anglais, grands amateurs aujourd’hui encore de crus madériens, s’est accrue sur l’île. Au XIXe siècle, la Russie est devenue le principal pays d’exportation du vin de Madère, suivie par les États-Unis et toujours par le Royaume-Unis.

Au cours des XIXe et XXe siècles, Madère est devenue l’une des premières destinations touristiques d’Europe, très recherchée par l’aristocratie européenne de l’époque. L’air pur et marin de l’île ainsi que ses paysages montagneux à la végétation luxuriante étaient recommandés par les médecins aux patients atteints de tuberculose et autres maladies pulmonaires. Beaucoup sont venus ici pour effectuer leur convalescence et ont participé ainsi au développement des infrastructures touristiques de l’ile. En effet, l’une des plus grandes attractions touristiques de Madère est sa végétation dense et variée, qui combine des caractéristiques tropicales et méditerranéennes pour donner naissance à une mosaïque végétale diversifiée riche en nuances de vert, de formes et de tailles distinctes. Contrairement à d’autres îles colonisées, à Madère, les marques de l’Histoire sont relativement récentes ; il n’y a pas de vestiges préhistoriques, ni de ruines de l’Antiquité ou châteaux médiévaux et c’est l’histoire naturelle qui compose son patrimoine culturel. L’un de ces joyaux est sans aucun doute la forêt préhistorique de lauriers, la seule au monde à avoir survécu à la dernière ère glaciaire. L’archipel possède l’une des flores les mieux préservées de Macaronésie où cohabitent plus de 150 espèces endémiques et environ 800 venues d’ailleurs. La plus connue des endémiques est la godiera da Madeira, une orchidée extrêmement fragile aux pétales blancs qui vit entre 300 et 800 mètres d’altitude.

Malgré une superficie totale qui ne dépasse pas 737 km2, la biodiversité végétale est impressionnante grâce à un sol acide, pauvre en calcium et potassium mais riche en humus et un climat océanique aux températures printanières toute l’année. On définit la végétation de l’archipel comme étant tropicale et méditerranéenne ; c’est donc tout naturellement que des fruits exotiques et d’autres plus classiques poussent un peu partout sur le territoire. Le fruit de la passion, les « pitangas » ou cerises de Cayenne, le tamarillo, la goyave sont quelques-uns des spécimens les plus populaires de Madère, sans compter la célèbre banane homonyme. Il s’agit d’une sous-espèce plus petite que la banane sud-américaine avec un parfum et un goût plus intense et sucré. Introduits sur l’île au XVIe siècle il existe une référence écrite aux bananiers de Madère datant de 1552, on pense qu’ils ont été apportés des îles Canaries ou du Cap-Vert et sont devenus une partie intégrante du paysage et de la gastronomie locale.

L’île de Madère, entourée par l’océan Atlantique, a toujours été un point de passage stratégique pour les bateaux de différents pays. Le contact avec les équipages a suscité chez les habitants locaux un désir croissant d’émigrer, de savoir ce qui se trouvait au-delà de la vaste mer. Des nouvelles ont commencé à circuler sur les opportunités d’emploi dans d’autres pays en développement comme le Brésil, l’Afrique du Sud ou le Venezuela. Le travail sur l’île était dur et les Madériens fatigués de besogner dans des terres arables difficiles et de transporter des marchandises vers la côte par des routes escarpées et dangereuses, ont été encouragés par cette nouvelle dynamique de découverte d’autres horizons. L’Insulaire a commencé à considérer l’émigration comme une possibilité d’améliorer ses conditions de vie et de travail. Le saviez-vous ? L’Afrique du Sud et le Venezuela étaient entre la fin du XIXe siècle et les années 60, les principales destinations de l’émigration des Portugais d’outre-mer. Aujourd’hui, ce flux migratoire prend le chemin inverse.

Johanna Trevoizan

Photos Turismo de Madeira

Share this story

PinIt
LinkedIn
Share
WhatsApp