En Algarve, les domaines de Casteleja et de Monte do Além, réussissent malgré les difficultés climatiques, à produire de grands vins biologiques
Si les producteurs industriels omettent parfois de mentionner certains ingrédients sur leurs étiquettes, faute d’espace, ce n’est pas le cas de Guillaume Leroux, de Casteleja à Sargaçal, premier vignoble certifié biologique de l’Algarve. À deux pas de là, à Odiáxere, les viticulteurs écologiques de Monte do Além soulignent le contraste qu’offrent les vins biologiques. Leurs raisins, vendangés à la main, sont sans correction d’acidité, ni accélération de particules, et contiennent une quantité minimum de sulfates : « En d’autres termes, ils sont meilleurs pour la santé ». Cette forme de culture préventive, utilise des moyens naturels pour protéger la vigne « dans le respect du sol et du bien-être des consommateurs, sans fongicide de synthèse, insecticide ou herbicide ». Et comme le suffixe -cide vient du français « tueur », Vinciane, de Monte do Além, a supprimé dès le départ ce type de procédé visant à anéantir la végétation.
Pour Guillaume, œnologue de formation, le voyage vers l’exploitation écologique a été un heureux hasard. Son intention était uniquement d’élaborer des crus portugais, de la meilleure qualité qui soit : « Le sujet m’a intéressé pendant mes études, mais j’ai commencé de manière conventionnelle, dit-il. Je me suis vite rendu compte que ce n’était pas le bon moyen, et qu’avec les produits chimiques, la terre semblait brûler. Il n’y avait pas d’herbe. De plus, ils affectent directement les fruits, et donc empoisonnent le consommateur ». Ce n’est qu’en 2006, six ans après la création du domaine, qu’une rencontre fortuite avec un agriculteur biologique suédois a tout changé. Guillaume s’est rapidement retrouvé à observer, puis à expérimenter son savoir-faire. La terre blanchie, sèche et dépourvue d’éléments nutritifs a commencé à se reconstituer, et l’herbe verte a poussé là où il n’y en avait pas. Les raisins ont également évolué en qualité, ainsi, il a décidé de se convertir, pour donner vie en 2012, au premier vin certifié Bio de l’Algarve.
Ce passage a nécessité l’utilisation de différentes méthodes de gestion du terroir, y compris des pratiques familières à beaucoup d’entre nous, comme le recyclage et la réutilisation. Il explique que ce qui est prélevé dans les vignes est remis en terre pour les nourrir : « Chaque élément est important. Les mauvaises herbes, les oies, ou la culture des fèves qui attire les escargots hors des sillons, contribuent au bon développement des pieds.»
Le principal acteur et ingrédient de la réussite, est l’eau. Initialement, il n’y avait pas d’irrigation à Sargaçal, puisque les racines devaient atteindre les réserves souterraines. Cependant, en raison des changements climatiques rapides, et de la diminution des ressources, le viticulteur a finalement dû installer un système d’arrosage. À Odiáxere, le goutte à goutte de la vigne à la vigne minimise le gaspillage, et assure une hydratation contrôlée, mais ces processus ont fait baisser le rendement des domaines.
Pour remédier à cela, des techniques biodynamiques ont été explorées, et Casteleja a lancé un projet de permaculture et de biodiversité. Ces efforts sont motivés par l’engagement à prendre soin du terroir, en imitant l’environnement, et en assurant sa longévité : « Protéger le sol est devenu la chose la plus importante. Ce que nous faisons aujourd’hui va influencer la fertilité de la terre pour l’avenir. La question est : comment maintenir cet équilibre ? »
Peut-être la réponse réside-t-elle dans les cycles de la nature ou dans l’emblème du Monte do Além, qui représente un serpent mangeant sa propre queue . « Il n’y a pas une seule vérité pour le vigneron, mais une recherche incessante de la perfection, basée sur les connaissances acquises au fil des siècles ». Si des années de sagesse, et de méthodes d’agriculture biologique, peuvent amener les producteurs modernes à reconnaître, malgré les difficultés, les avantages de travailler en harmonie avec l’environnement, alors il y a encore de l’espoir.