Toujours dans la région centre mais un peu plus à l’ouest de Tomar, deux autres monstres de l’architecture et de l’Histoire se partagent la scène, d’un coté Alcobaça et de l’autre Batalha
Si les pommes d’Alcobaça sont appréciées dans tout le pays, la petite ville attire les visiteurs pour son abbaye, l’une des premières constructions monastiques cisterciennes en territoire portugais. Également classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, la construction de cette imposante bâtisse date exactement du 8 avril 1153 et du haut de ses presque 900 ans, a réussi à conserver toute sa structure. Le monastère est donc contemporain de la création du royaume portugais et a été offert aux moines de l’ordre de Cister par le premier roi lusitanien, Dom Afonso Henriques. Les bases médiévales sont restées intactes mais cet ensemble unique témoigne à lui seul de l’importante évolution architecturale opérée entre les XVIe au XVIIIe siècle. Sur la façade de l’église, seul le portique gothique est d’origine et à l’intérieur, la nef centrale grandiose dépouillée de tout ornement produit un sentiment d’élévation et de spiritualité. Au centre de chaque bras du transept, on peut voir deux chefs-d’œuvre de la statuaire médiévale, les tombeaux de Dom Pedro I (1357-67) et de Dona Inês, placés face à face pour qu’ils puissent se retrouver le jour de la Résurrection (cf rubrique Infos et Culture). Une visite des salles anciennes qui entourent le cloître est indispensable. On peut donc traverser le réfectoire, le dortoir, la salle capitulaire, la surprenante cuisine aux azulejos bleus avec ses immenses cheminées et son lavoir, ainsi que la salle des rois.
Dans un style un peu plus simple et à quelques minutes de voitures, le monastère féminin ou couvent cistercien de Coz est tout aussi digne d’intérêt, bien qu’il ait malheureusement souffert du temps qui passe. Il est intéressant de constater en visitant ces lieux de cultes historiques que lorsque l’on se retrouve face à un domaine habité par des femmes, la porte d’entrée y est latérale, alors que lorsqu’il s’agit de moines, elle est frontale. La spécialité culinaire de cette région à forte influence catholique sont les « doces conventuais », en français « douceurs du couvent ». Ce sont des pâtisserie, composées principalement de jaunes d’oeufs, de sucre, d’amandes ou autres fruits à coques. On peut dire que ce genre de recette est relative aux sucreries proposées dans tout le pays, aussi certains se seront probablement déjà fait cette réflexion : pourquoi arborent-elles toutes une couleur très blonde ? Et bien c’est parce qu’à l’époque, les nonnes utilisaient les blancs d’oeufs pour nettoyer leurs robes ou les cols romains des prêtres et ne savaient pas quoi faire de tous les jaunes à priori inutiles. Elles les ont donc recyclés dans la gastronomie que l’on appelle aujourd’hui et pour cause, « conventual ».
Pour finir, avant de se diriger vers Batalha, le pittoresque village de Coz qui donne son nom à la chapelle, est connu pour ses paniers très typiques. Des nostalgiques du savoir-faire ancestrale de leur fabrication ont créé le projet Cozart. Il s’agit d’une initiative d’entrepreneuriat sociale qui vise à revitaliser l’art centenaire des vanniers et des tisseurs, en formant des artisans qui pourront maintenir et faire vivre ce patrimoine local. Si leurs œuvres sont en tout point traditionnelles de par leurs formes et leurs motifs, chacun d’entre nous à déjà aperçu un modèle du même type dans une boutique de souvenirs ou de design, ces créateurs sexagénaires se laissent malgré tout aller à l’originalité.
Pour plus d’informations, rendez-vous sur projetocozart@cbesfc.pt
Batalha est aussi un monastère, cette fois d’une impressionnante dimension et d’une incroyable richesse en détail que l’on peut apercevoir depuis l’autoroute, à l’entrée de la ville. Santa Maria da Vitória de son vrai nom, est un ensemble architectural exceptionnel, résultat d’une promesse faite par le roi Dom João Ier en hommage à la victoire d’Aljubarrota, une bataille livrée le 14 août 1385 qui lui assura le trône et garantissait l’indépendance du Portugal. Sa construction a duré plus de 150 ans, aussi les différents styles représentés sont facilement perceptibles : gothiques (prédominantes), manuélin, ainsi qu’une brève note Renaissance. Le complexe monastique est composé d’une église, de deux cloîtres avec dépendances attenantes, de deux panthéons royaux, la Chapelle du Fondateur et les Chapelles imparfaites.
Contrairement à ses voisins d’Alcobaça cisterciens, dont les habitants vivent reclus et isolés, il s’agit ici d’un édifice consacré à saint Dominique et à ses membres faisant partie des « mendiants », proches de la population. En possession des Dominicains jusqu’à l’extinction des ordres religieux en 1834, le monument est aujourd’hui sous la responsabilité de la Direction générale du patrimoine culturel (DGPC) et est reconnu depuis 1983 au Patrimoine Mondial l’UNESCO.
Non loin de là, sur la route de Fatima, une escale à l’Aldeia Pia do Urso s’impose. Après tant de visites historiques et de contemplations architecturales et religieuses, une pause pour se dégourdir les jambes est plus que bienvenue. Cet authentique village séculaire a été récemment restauré et transformé en écoparc sensoriel, bien qu’il soit encore habité.
Dans cette région où la pureté de l’eau fait la fierté de ses natifs, la légende veut qu’un ours se soit arrêté dans cette bourgade parsemée de puits naturels (pia) pour se désaltérer, lui donnant ainsi son nom, « puit de l’ours ». Aujourd’hui on peut effectuer un parcours thématique autour de ces fameuses « pia », à pied ou en vélo, et continuer si on le souhaite sur un sentier balisé qui fait partie des Chemins de Compostelle.
Outre le paysage attrayant et le calme environnant, le parc est composé de plusieurs étapes interactives et ludiques, d’espaces pique-nique, d’une station de réparation pour VTT et est adapté aux non-voyants. C’est un endroit idéal pour passer une après-midi, une journée ou plus, loin du tumulte citadin et en parfaite harmonie avec la nature.