Le chef Luis Gaspar oscille entre passé et futur au restaurant Brilhante avec finesse, qualité et, toujours le goût du détail.
Dans le quartier du Cais do Sodré à Lisbonne, à la fois populaire et bobo, le restaurant Brilhante est une invitation à l’élégance dans une ambiance de brasserie. Il est vrai qu’en franchissant le pas de ce dernier espace du chef Luis Gaspar on hésite entre bistrot parisien typique ou pub irlandais clandestin de la prohibition. Et c’est, dans les faits, les deux styles qui ont inspiré les lieux ; la France pour la cuisine, et l’Irlande pour la sélection de 60 whiskeys d’exception du bar, venus du monde entier.
À l’intérieur, la cuisine émerge au centre du restaurant, entourée d’un imposant comptoir de 26 places. Les heureux clients peuvent ainsi décider de prendre place au comptoir qui encercle la cuisine ou de s’assoir bien confortablement et en toute intimité à une table. L’ensemble de l’espace, riche en matériaux nobles tels que le bois foncé, le laiton, le cuir et le velours, est un hommage à la sophistication, complété par les couleurs nacrées du carmin et du rouge vif.
La vedette du menu est le « Bife à Brilhante », un plat inspiré du classique « Bife à Marrare » de Lisbonne (tout comme au Café São Bento que vous pourrez découvrir chers lecteurs dans cette édition de Vivre le Portugal), une spécialité qui a été éternisée dans les célèbres cafés du XIXe siècle, et qui est maintenant accompagnée d’une recette perfectionnée par le chef Luís Gaspar et son équipe, un véritable secret de saveur et de technique gardé sous clé.
Sous la houlette de ce dernier, la carte suit un parcours raffiné en termes de cuisine française traditionnelle avec quelques variations internationales dont le clou est le faux filet agrémenté de sa très secrète sauce : « Il s’agit d’un plat emblématique de la ville de Lisbonne, apporté par Antonio Marrare, un cuisinier napolitain, à la fin du XVIIIe siècle », révèle le chef Luís Gaspar, soulignant l’importance de rendre hommage à un classique aussi important en y apportant une touche différente « et secrète ». La recette, inspirée de l’original, a « une personnalité différente, essentiellement dans la sauce ».
Le même menu propose d’autres plats intemporels de la cuisine internationale classique, également parfaits pour le déjeuner et le dîner. En entrée, un foie gras au torchon, des Saint-Jacques au champagne, un carpaccio de bœuf ou encore du saumon Gravlax sont quelques-unes des options disponibles, suivis de riz au homard, d’un bar au beurre blanc de champagne, un wrap de homard et un risotto aux champignons. Pour les clients qui souhaitent un repas plus léger mais néanmoins spécial, le menu du soir « Bubbles&Co » associe le champagne à la fraîcheur des huîtres dans une dégustation unique.
En ce qui concerne les accompagnements, le chef propose une petite « tartiflette » au reblochon mais sans lardons, une purée de pommes de terre truffée et les frites, pour lesquelles on applique « la technique de la double friture dans laquelle la pomme de terre est toujours croustillante », une approche contemporaine de recettes plus classiques que le chef Luís Gaspar met un point d’honneur à appliquer dans sa cuisine.
Les pâtisseries figurent également en bonne place sur la carte du Brilhante. Créés par la cheffe pâtissière résidente, Ângela Granho, sous la supervision de Claiton Ferreira, chef pâtissier exécutif de Plateform, les desserts comprennent des délices tels qu’un soufflé aux noisettes et au chocolat, une crème brûlée très réussie ou encore un millefeuille à la vanille et au caramel. En tenant compte de la saisonnalité, Luís Gaspar mise sur des références gastronomiques très spéciales pour les futurs menus, ce qui « fait partie de la croissance et de l’évolution du restaurant », malgré une volonté de toujours se cantonner au « classique ».
Créatif, méthodique, pluriel, il est ce que l’on pourrait appeler le « planificateur parfait ». Il coordonne les concepts, les équipes et les méthodes et ne refuse jamais les nouveaux défis. L’histoire raconte que Luís Gaspar a toujours voulu se mettre aux fourneaux. Dans sa jeunesse, il adorait passer des heures aux fourneaux avec sa mère. C’est donc sans surprise qu’il a décidé, en 1991, de s’inscrire à l’école professionnelle de Leiria, sa ville natale, à l’âge de 15 ans. Après avoir terminé ses études, il a obtenu son premier emploi en travaillant aux côtés du prestigieux chef français Aimé Barroyer au Pestana Palace Hotel, où il est resté pendant deux ans. Il est ensuite passé à l’hôtel Grande Villa Itália, où il a passé trois autres années.
En cours de route, il a rencontré le chef Henrique Sá Pessoa lors d’un événement gastronomique. Il finit par rejoindre Henrique à Cais da Pedra et s’installe avec lui lorsqu’il ouvre son restaurant éponyme au Mercado da Ribeira. Il avait 24 ans lor squ’il a été invité à jouer le rôle principal dans la cuisine de la Sala de Corte. Pour la communauté gastronomique portugaise, sa nomination et ses performances ultérieures l’ont placé sous les feux de la rampe. En 2017, il a remporté le prix du Chef de l’année, l’un des concours les plus importants du Portugal pour les professionnels de la cuisine. Aujourd’hui toujours par monts et par vaux, il a laissé les fourneaux du Brilhante à sa jeune pupille Gabriella Almeida et montre encore une fois que son établissement surfe sur le passé et le futur. Un service aux petits oignons avec André qui s’exprime en prime à la perfection dans la langue de Molière, une carte des vins à couper le souffle avec notamment quelques étiquettes de l’Hexagone et un mixologiste qui adapte ses cocktails en fonction du choix du whiskey de chacun. C’est un grand bravo brillant à l’équipe du Brilhante !
Amélie Doinel