La découverte d’un fossile unique à Salir a conduit à la création d’un futur géo parc, qui devrait bientôt être reconnu au Patrimoine Mondial de l’UNESCO.
Si l’Algarvensis est depuis 2019 aspirant au titre « Géo parc Mondial de l’UNESCO », son histoire remonte à 255 millions d’années, dans le Trias, d’où provient le fossile de salamandre géante (Metoposaurus algarvensis) trouvé au pied de Rocha da Pena près de Penina, par le chercheur lisboète Otávio Mateus.
« Pour aspirer à cette reconnaissance, nous devions disposer d’un site géologique unique au niveau mondial. Le fossile découvert en Algarve est le premier de son genre à être décrit et, pour l’instant, c’est le seul endroit au monde où l’espèce est répertoriée. Le chercheur a contacté Loulé et le maire a parlé aux municipalités de Silves et d’Albufeira dans le but de créer un territoire homogène en termes géologiques », explique la professeure et chercheuse Cristina Veiga Pires, actuelle coordinatrice scientifique du « Geoparque Algarvensis ».
En pratique, un géo parc est une zone territoriale aux limites bien définies qui combine un patrimoine géologique de grande importance nationale et internationale, une stratégie de géo conservation ainsi qu’un ensemble de politiques d’éducation environnementale pour la promotion d’un développement socio-économique, qui implique la communauté locale et contribue à la valorisation des produits du cru.
Dans le cas de Geoparque Algarvensis, il s’agit d’une zone totale de 1381 kilomètres carrés qui couvre trois « concelhos » (départements) et 17 communes, dont la moitié est considérée de faible densité, et comprend tout le patrimoine culturel et naturel de la région : les routes, les sentiers, la faune, la flore, les églises, les moulins, les villages traditionnels et même certaines boutiques. En outre, au niveau géologique certains géo sites bénéficient de différents degrés d’importance : « Les sites peuvent être internationaux, c’est-à-dire unique au monde comme c’est le cas du Métoposaure, nationaux, comme la mine de sel-gemme de Loulé, la seule à être exploitée à 200 mètres de profondeur au Portugal, ou encore locaux », explique la spécialiste. Dans l’Algarvensis, 45 géo sites ont déjà été identifiés sur l’ensemble du territoire, de caractéristiques et de valeurs différentes, comme la Fonte Benémola, à Loulé, le Planalto do Escarpão, à Albufeira ou les Grés à Silves.
« La limite du géo parc a été volontairement définie pour ne pas inclure la zone côtière. Bien que d’un point de vue géologique il y ait beaucoup de patrimoine sur la côte, le projet est justement de développer l’intérieur de l’Algarve. Nous avons décidé de nous concentrer uniquement sur les terres afin de présenter un projet cohérent », assure Cristina Veiga Pires.
Les objectifs d’Algarvensis sont bien définis : « Réaliser des activités culturelles dans les géo sites avec des informations pour la population. La devise est le développement durable avec de nouveaux aspects de géo tourisme, d’artisanat, de gastronomie et d’économie circulaire », affirme la scientifique. Ainsi, le « Geopalcos », un événement qui réunit l’art, la science et la nature avec le public dans dix lieux différents est un parfait exemple pour illustrer l’initiative ; la première a eu lieu entre le 29 mai et le 12 septembre 2021, et la prochaine édition est prévue pour 2023. Dans le même registre, le livre « Uma história com muitos milhões de anos : Do oceano Tethys ao barrocal do Algarve », écrit par la professeure Delmira Moura et la chercheuse Sónia Oliveira en collaboration avec le conseil municipal d’Albufeira, traite « d’informations scientifiques centrées sur le plateau de l’Escarpão et invite à découvrir le nouveau sentier PR4, créé dans le cadre de la candidature UNESCO », précise-t-elle.
Enfin, dans le petit village de Penina qui, motivé par le Geoparque Algarvensis, un journal local ainsi qu’une foire annuelle ont été créés pour présenter les usages et traditions artisanales des entourages, dans une ambiance musicale avec des ateliers et la possibilité d’arpenter des sentiers de randonnée à la découverte du patrimoine territorial. « Un rappeur algarvien a composé et interprété une chanson en rapport avec le Métoposaure. C’est un excellent exemple de ce que nous voulons », confie Cristina Veiga Pires. Par ailleurs, un rond-point Metoposaurus algarvensis a été inauguré en avril, près de l’une des entrées de Salir, avec la sculpture d’une salamandre géante conçue par Pedro Cabral Santo et Nuno Esteves da Silva.
Pour les mois à venir, la priorité est bien définie et servira à l’ensemble de la candidature : « Nous devons former une association ou une entité de gestion qui se consacre à 100 % à ce projet ; j’espère qu’elle sera effective à partir du début de l’année 2023 et qu’entre 2024 et 2025, la candidature sera formalisée ».
Cette demande, si elle est approuvée, permettra de classer l’Algarvensis comme un géo parc mondial de l’UNESCO : « Il s’agit d’un label de qualité fondé sur la durabilité de la géologie et son interaction avec le paysage et la communauté environnante », conclut la chercheuse.
La prochaine étape sera la création d’un siège, d’un centre d’interprétation et d’un éventuel musée du site où a été trouvé le fossile de Metoposaurus algarvensis qui est pour le moment exposé au musée municipal de Loulé. Actuellement, le Portugal compte cinq géo parcs mondiaux de l’UNESCO : Açores, Arouca, Estrela, Naturtejo et Terras de Cavaleiro, ainsi que trois autres en devenir : Oeste, sur le point de présenter une demande, Viana do Castelo et Algarvensis.
Maria Simiris
Photos Vasco Célio