La « Ginjinha Sem Rival » menacée par un investisseur étranger : le patrimoine lisboète en péril

Fondée en 1890, l’enseigne historique se bat pour sa survie face aux pressions immobilières

Un nouvel emblème de Lisbonne risque de disparaître sous la pression de l’investissement étranger. La célèbre Ginjinha Sem Rival, fondée en 1890, se retrouve au cœur d’un bras de fer avec son propriétaire, le businessman allemand Axel Gassmann, déjà gestionnaire d’un hôtel cinq étoiles dans le même immeuble.

Située Rua das Portas de Santo Antão, à deux pas de la Praça do Rossio, l’institution lisboète s’est vu notifier la résiliation de son bail. Une décision contre laquelle s’insurge Nuno Gonçalves, arrière-petit-fils du fondateur et actuel gérant, qui promet de « se battre jusqu’au bout », y compris devant la justice.

La mairie de Lisbonne, via son programme Lojas com História, tente de jouer les médiateurs pour préserver ce qui reste du commerce traditionnel, de plus en plus menacé par la spéculation immobilière.

Malgré la menace de fermeture, la Ginjinha continue d’attirer chaque jour des centaines de touristes venus déguster la célèbre liqueur de griottes, servie depuis plus de 50 ans par Abílio Coelho, figure incontournable derrière le comptoir.

Mais le dialogue est rompu. Selon Nuno Gonçalves, le propriétaire refuse toute discussion, que ce soit avec lui ou avec la municipalité. Une offre de rachat, jugée « dérisoire » — 250 000 euros —, a été immédiatement rejetée par la famille. « C’est insultant pour une entreprise qui a 135 ans d’histoire », déplore-t-il.

Pour lui, « les investisseurs étrangers ne peuvent pas arriver ici et faire ce qu’ils veulent. Sinon, un jour, il n’y aura plus aucun commerce traditionnel à Lisbonne », a-t-il confié à Expresso.

Malgré l’ordre de fermeture prévu pour lundi prochain, le gérant affirme que la boutique restera ouverte tant qu’un tribunal n’aura pas statué. Il s’appuie sur la loi qui protège les commerces classés Lojas com História jusqu’à fin 2027.

Diogo Moura, élu municipal en charge du programme, confirme cet encadrement légal : « La loi prévoit que ces contrats sont protégés jusqu’au 31 décembre 2027. C’est aussi l’interprétation de la mairie et du locataire », a-t-il déclaré à l’agence Lusa.

Bien que limité face à un conflit entre acteurs privés, le conseil municipal se dit prêt à accompagner la procédure judiciaire, tout en travaillant parallèlement à une révision des règles encadrant les Lojas com História, avec la participation de 14 autres municipalités. L’objectif : renforcer la protection de ces commerces emblématiques et garantir leur pérennité.

De son côté, Europe Hotels International (EHI), propriétaire de l’immeuble, affirme rester « ouvert à un accord », proposant au gérant de transférer la boutique vers un autre emplacement, tout en maintenant la production et la distribution, notamment au sein de l’hôtel.

EHI assure vouloir préserver l’âme du lieu, tout en procédant à des rénovations. « Nous souhaitons conserver le concept, l’image et la qualité, tout en améliorant l’apparence de l’espace », déclare une source interne, qui affirme que l’intention est de « sauvegarder la tradition lisboète ».

Mais pour la société, le contrat actuel serait exclu du dispositif Lojas com História, en raison d’un changement de bail signé en 2014 avec l’ancien propriétaire russe.

La mobilisation citoyenne s’organise. L’association Fórum Cidadania LX, à l’origine du programme Lojas com História, rappelle que « les mêmes menaces pesaient déjà sur cette boutique il y a 15 ans, avant même la création du label ».

Pour son porte-parole, Paulo Ferrero, « la préservation des commerces historiques passe par une véritable politique d’aménagement commercial », sans quoi Lisbonne risque de perdre son identité au profit de la spéculation.

Un rassemblement de soutien est prévu le 5 juillet à 20h devant la boutique, ouvert à toute la communauté.

Source : LUSA/ Expresso

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